dimanche 30 juin 2013

Mexique (5)

Reserva de la biosfera de los Montes Azules. Laguna Miramar

                Je crois que c’est la zone la plus reculée du pays où je me suis rendue. A 6 heures de 4 roues (quand tout va bien) de la première ville. J’ai logé dans des cabanes près du fleuve dans un village appelé Emiliano Zapata (rien de moins) au cœur de la forêt Lacandone, là où il fût un temps les zapatistes se retirèrent lustrer leurs revendications. J’ai fait connaissance rapidement avec les gestionnaires du parc naturel et la famille de la cantine (il n’y a ici ni hôtel, ni restaurant. Juste des maisons, une école et une église, 3 téléphones pour tout le monde et pas de réseau, donc pas de portable. Les gars du parc se communiquent par radio ou par un haut parleur qui raisonne dans tout le village).
                Le lendemain matin, je pars aux aurores avec Mario pour la Laguna Miramar à 6 km du village par une piste boueuse. La brume monte lentement au loin sur les collines, le maïs est haut dans les champs, des cavaliers nous dépassent par moment. A 8 heures je découvre la féérie du lac. Pas une brise. On sort le canoë et on part ramer en longeant la rive ou pas un seul centimètre n’échappe à la végétation. Au sommet des arbres, je vois des singes hurleurs (ils poussent vraiment des aboiements!) sauter de branche en branche. On gare le canoë pour s’enfoncer dans la jungle avec des mille patte orange et brun foncé, des figuiers étrangleurs, des champignons étranges. De retour au campement il y a du monde. Les uns boivent le pozol, d’autres attendent je sais pas quoi. Les enfants de la famille qui tient la cantine au village sont venus pour passer la nuit dans les hamacs et tenir compagnie au gardien qui, lui, fait des tours de 24h. Les enfants sont curieux et me posent plein de questions. Ils me montrent des jeux avec des graines rouges. On décide de faire un château de sable. Mais avec quoi? Des bouteilles en plastique sont sorties de la poubelle et découpées à coup de machette (la machette dans cette région est l’instrument incontournable). Le château se transforme vite en volcan profond creusé à la base d’un tunnel afin de générer un système d’écoulement. Ensuite c’est l’heure de la baignade. L’eau du lac doit être à 30 degrés… et transparente d’un bout à l’autre. On y pêche des perches.
                Je ne passerais pas la nuit au campement. Des braconniers y traînent pour tuer les singes qui sont en voie de disparition. Ce n’est pas eux qui me font peur. En fait c’était juste un mauvais calcul de ma part.
Pour me rendre à l’endroit dont je vous parle j’ai voyagé dans un camion à bestiaux (eux, ils appellent ça un tres toneladas, moi je trouve que ça fait transport du bétail, voir les photos ci-après). A l’allée entre deux bidons de 200 litres d’essence, des pieds (chaussés) suspendus au dessus de la tête et au retour la joue contre une roue de camion, des sacs de frijoles et des poules dans les jambes. Le retour a été corsé comme un bon café du Chiapas quand en descendant dans une vallée, un camion pepsi embourbé dans le fossé suite à un effondrement de terrain (une chance que la piste se soit juste affaissée) barrant la route s’offre à nous. Coupage du moteur, tout le monde descend. Des types étaient déjà à l’œuvre pour sortir la tonne de bouteille de 3 litres de pepsi et la transférer dans deux autres pick-up. Ensuite il a fallu amarré un câble et l’autre camion pepsi a tiré le premier camion de toute son âme. Bref on s’est retardé de plusieurs heures et ensuite, je sais pas pourquoi mais de plus en plus de passagers se sont mis à monter. Accrochés aux armatures de la bâche, envahissant le corps du camion à bestiaux. Les trois dernières heures il fallu voyager debout au rythme des nids de poule de la piste. La pluie s’est mise de la partie, le froid s’y est associé rapidement. La bâche était mal mise bien sûr. Quand je suis arrivée à destination (après 8 heures dans le camion à bestiaux), je me suis installée au restau le plus chic de la place, j’ai commandé à bouffer et j’ai regardé un match de foot: Espagne-Brésil.
                Mais rassurez-vous, tout valait le coup.

Exemple de camion à bestiaux qui nous sert de moyen de transport pour les 6 heures de route

vestidos locales

la pluie (le rideau dans le fond sur la gauche)

A la cantine du village, j'ai commandé du poulet. Il suffit de demander

départ vers la Laguna Miramar, Reserva de la biosfera de los Montes Azules

Jungle sur les rives de la laguna

jungle (détail)

Mario et sa machette (pratique pour ramener des plantes qui soignent les reins)

la laguna

Château de sable avec Moncho et Berenice

sur le canoe

la baignade

plus de 400 espèces de papillons dans la forêt Lacandone

le camion pepsi embourbé

pepsi tiré par pepsi par un câble

dans le camion avant la pluie

peuples indigènes du Chiapas

jeudi 27 juin 2013

Mexique (4)

Ocosingo. Tonina, CHIAPAS
  petit dejeuner avant de prendre la route


masque funéraire. civilisation maya

sur la route entre Palenque et Ocosingo

Ocosingo. La plazita et les vendeurs de glace

la cox, l'obsession mexicaine

petit matin. En route pour Tonina

Tonina. Cité Maya. 7ième siècle

boule de Noël dans un arbre dans les zones pastorales du Chiapas

Tonina, la colline de 80 mètres

Sur les ruines

les mayas se déformaient le crâne pour lui donner un aspect d'un grain de mais (ou de haricot)

el paseito a caballo. divino!

Rolando y su caballo

en el collectivo

lundi 24 juin 2013

Mexique (3)


Palenque. Aux larmes citoyens

                Après Cancun, j’ai transité à Mexico City puis Villahermosa avant de finalement loger à Palenque. Les attentes dans les aéroports sont l’occasion de travailler. Assise près d’une borne électrique, le fil écrasé toutes les 5 minutes sur la moquette par les trolleys des voyageurs, surveillant de temps en temps les écrans de contrôle, je pianote. Mais mon esprit divague progressivement., je ne peux échapper à la tropicalité. La nuit de l’iguane? La michelada siroté sans glaçon. Les ruisseaux de sueur qui coulent entre les épaules. Les peaux tannées jeunes ou vieilles, couleur d’origine ou peintes par le soleil. Baffles sursautantes dans la rue. Coccinelles de plusieurs couleurs partout. C’est le côté rétro de Mexique. Ils adorent la W et ils ont bien raison. Bien plus belles que les mega pick rutilantes.
                Je mange un guacamole dans mon restau préféré. Je repense à Poncho et à la tête qu’il avait fait quand j’avais préparé un plat similaire à je-ne-sais-plus quelle occasion. Il avait goûté, froncé les sourcils: ça du guacamole? Sans doute n’avais-je pas mixé les avocats de la même façon et puis il manquait certainement une dose d’épice. Mais bon, de là à me regarder comme si j’avais commis un crime de lèse-majesté…
                Je me souviens aussi d’un retour nocturne avec San à Madrid; le chauffeur du taxi nous avait joué «las mañanitas». C’était une soirée halloween. San était déguisée en Shéhérazade, moi en sorcière et Mar en miss Over-Dosis. C’est difficile d’imaginer la vie à Madrid sans eux. Nous formions une belle brochette de locos venant du nord ou du sud, d’un continant jeune ou d’un continent vieux, certains sans droit de résidence dans l’espace Schengen. Une alternance de nopales, chiles, steak aux hormones, frites, baguettes, pomodoro et chorizo. Je suis sûre que j’en oublie. Ces ingrédients aujourd’hui atomisés, volés dans tous les sens, trempés dans une sauce piquante pour les uns, plus suave pour d’autres.
                Ce nuage de souvenirs passe devant le grand portrait représentant des indiens suspendu au dessus du king size dans ma chambre. Un nuage et une chanson enregistrée et envoyée, des messages de tous bords que j’écoute, lis en arrangeant des rendez-vous proches. Voir les heures passer à l’abri bien au frais, en découdre avec Pakal, le chapelet des civilisations qui s’établirent ici, être fascinée par les têtes aux traits exagérés, ne toujours pas savoir quelles sont ces bêtes qui poussent des cris électriques dans la jungle, etc… Activités de routards.

leaving Cancun
villahermosa (transit)
Villahermosa (transit)
tout est dit
les grands magnas du pétrole mexiquain
Palenque, la plazita
Baile infentil de Chiapas, Palenque
Crâne de cervidé, templo de la calavera, Palenque
Le templo de las inscripciones et ses bâches
ruinas mayas, El Palacio, Palenque
Grupo de las cruces, Palenque
tenue camouflage
Un petit air d'Angkor Vat

jeudi 20 juin 2013

Mexique (2)


Cancun. Jusqu’ici tout va bien.

Petit moment de répit à l’hôtel Krystal, comme dans les romans de Rolin. Le ciel a été sombre toute la journée sans enlever sa moiteur et sa lourdeur à l’atmosphère. Dans la chambre, à cause de la clim je mets ma veste pour écrire tant j’ai l’impression d’être dans un frigo. J’ouvre la fenêtre pour entendre le bruit des vagues; les meubles et le sol se couvrent d’une fine pellicule de buée.
                Cancun est une sorte d’anti-lieu, un amoncellement de bijoux en toc dans une mine de charbon. Le  faux luxe des hôtels, la fausse qualité partout sauf le personnel qui se montre peu avare en salutations. Autour c’est du béton délabré, des poubelles jetées sur des tas de graviers, des arcs en ferraille qui sortent des murs des édifices abandonnés, des vitres éclatées, du verre brisé devant de grands portails dont le grillage tordu indique l’effraction. Les bâtiments poussent puis se vident avec le temps. Dans leurs voisinages, d’autres sortent de terre, tapissés d’affiches de Lady Gaga, de Madonna et d’Elvis. Des spidermans attendent les passagers qui descendent des bus de villes.
                A cause du jet lag je suis dans la rue au petit matin à la recherche d’un café. Je marche sur le terrain encore fumant de la fiesta outrancière: flaques de bière et de cocktails, éclats de vomis sous les balcons de ces bars à ciel ouvert où la veille se dégingandaient les corps alcoolisés, gobelets en plastique qui roulent sur l’asphalte.
                Cancun c’est le train fantôme, le musée des horreurs avec une petite fenêtre ouverte sur un Eden presque irréel comme il se doit: une eau turquoise léchant le sable blanc sous une clarté aveuglante. Le monde regorge de ce ces lieux pour touristes en mal de vivre. En arrivant ici on croit tout simplement atterrir dans une époque post évènement planétaire: guerre, accident nucléaire, catastrophe climatique où seule une petite communauté de nantis aurait droit à un refuge. Un reflet des civilisations passées, présentes et futures. Les réfugiés à l’aisance matérielle et en proie au vide existentiel. Les autres survivants sans rien, sans même une vie vide de sens encore que s’ils prenaient le temps de l’écrire ils la trouveraient. Quoiqu’on en dise, ne pas se préoccuper de bouffer, ça laisse du temps pour remplir des cahiers de voyage, des carnets de bord et tout le bazar.